mardi 15 septembre 2015

LE BON BIO ?

  Le mythe du « bon bio » prend ses racines dans les années 1920 et 1930, d'une part avec le développement des théories ésotériques de l'anthroposophe Rudolf Steiner sur l'agriculture biodynamique (et son concept de « forces cosmiques ») ; d'autre part avec le courant hygiéniste, représenté notamment par des naturopathes convaincus de l'existence de « force vitales » (comme le Dr Paul Carton). Inutile de chercher des preuves scientifiques à l'existence de ces forces, voire de les quantifier : leurs adeptes vous expliquent qu'elles ne sont ni mesurables, ni détectables à l'analyse, sauf par d'obscurs tests dits de « cristallisation sensible » ! Ainsi, pour Steiner et Carton, seul un retour à une alimentation « naturelle » permet de mettre fin à « la dégénérescence de notre civilisation occidentale ».
  Ce discours a été popularisé dans les années 1940 et 1950 par Henri-Charles Geffroy, le fondateur de La Vie Claire, qui affirmait qu'une alimentation « à l’état le plus près possible de l’état naturel » ferait « immédiatement disparaître comme par enchantement toutes les infirmités ». A la même époque, le Dr Lenglet, président du Conseil supérieur d’hygiène publique de France entre 1940 et 1946, affirmait que « s’il y a une race française, on le doit au blé. Si le pain ne contient plus tous les éléments essentiels du blé, on diminue la vitalité de la race française. C’est la conséquence des procédés de la minoterie actuelle ».
  Certes, aujourd'hui, plus aucun défenseur de l'agriculture biologique n'oserait mentionner en public sa croyance dans ces prétendues forces vitales. En revanche, les partisans du tout-bio ont développé une thématique anxiogène axée sur la présence sournoise d'éléments chimiques indésirables et dangereux dans la nourriture « moderne ». Notre assiette serait ainsi « contaminée » par diverses substances maléfiques. Il existe une véritable industrie médiatique qui relaie ces thèses alarmistes, au grand bonheur des producteurs et vendeurs de produits bio qui sont à leur tour devenus une grosse machine industrielle. Une curieuse alliance s'est donc constituée entre les nouveaux Anges verts qui ne savent répétés que notre alimentation est dangereuse pour la santé, et les promoteurs de l'agriculture bio, seuls fournisseurs d'aliments « garantis bonne santé ».